Sous la pression de l’Union européenne, la France avait décidé de rendre obligatoire le contrôle technique pour les deux roues, les trois roues et les quadricycles à moteur à partir de 2023. Dès le lendemain de la publication du décret, le gouvernement a finalement décidé de suspendre l’obligation de contrôle technique pour les motos et autres voitures sans permis. Face à la colère des associations et de l’Europe d’un côté, mais également des motards de l’autre, la situation devrait donc rester figée jusqu’à nouvel ordre.
Motos : un contrôle technique devenu obligatoire durant l’été
Depuis 2014, une directive européenne impose l'instauration d'un contrôle technique obligatoire pour les deux et trois roues d'une cylindrée supérieure à 125 cm2, et ce, à compter du 1er janvier 2020. Après avoir déjà bénéficié d’un report de deux années, la France avait fini par céder, malgré la fronde des motards. Comme le prévoyait le décret n° 2021-1062 du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur, le contrôle technique devait devenir obligatoire à compter du 1er janvier 2023 pour toutes les motos (2 ou 3 roues), mais également pour les quadricycles à moteur, à savoir principalement les voitures sans permis jusqu’à présent exemptées.
Le contrôle technique, déjà obligatoire pour les voitures, devait s’appliquer dans les mêmes conditions aux deux et roues motorisés, ainsi qu’aux quadricycles à moteur. Par conséquent, le décret prévoyait un premier contrôle technique des motos dans les 6 mois précédant le 4e anniversaire du véhicule, puis un contrôle périodique tous les 2 ans. De plus, cet examen devait être obligatoire avant la vente d’une moto ou d’un quadricycle à moteur, tandis que les modèles de collection ne devaient passer le contrôle technique que tous les 5 ans, comme c’est le cas pour les voitures de collection. Dans le détail, cette nouvelle obligation aurait dû suivre un calendrier établi. Le 1er contrôle technique était en effet prévu avant :
- 2023 pour les véhicules immatriculés avant 2016 ;
- 2024 pour les véhicules immatriculés entre 2016 et 2020 ;
- 2025 pour les véhicules immatriculés en 2021 ;
- 2026 pour les véhicules immatriculés en 2022.
L’obligation de contrôle technique des motos suspendue
Dès le lendemain de la publication du décret au Journal officiel, à savoir le 12 août, le contrôle technique obligatoire des deux roues, des trois roues et des quadricycles à moteur a finalement été suspendu, et ce, sur demande du président de la République Emmanuel Macron. Si aucune raison sur ce report n’a véritablement été avancée, tout laisse à croire que la grogne des motards a fait pencher la balance.
Toutefois, le contrôle technique des motos n’est pour l’heure que reporté jusqu’à nouvel ordre, notamment car cette mesure est imposée par l’Union européenne. Dans l'optique de trouver une solution, le gouvernement a fait le choix de réunir les principales fédérations de motard début septembre, ces dernières ayant l'espoir qu'une dérogation soit accordée à la France, comme l'ont d’ailleurs déjà demandée l'Irlande, les Pays-Bas et la Finlande. Cette réunion a été l'occasion d'aborder trois thèmes de travail.
- Renforcer la sécurité routière : sensibilisation aux nouveaux équipements de sécurité, amélioration des routes, davantage de formations... autant de pistes évoquées pour limiter la mortalité routière dont sont victimes les motards.
- Lutter contre les nuisances sonores : le gouvernement entend contrôler plus efficacement les motards utilisant des équipements illégaux et des pots d'échappement non homologués, notamment en expérimentant des radars sonores.
- Diminuer la pollution : cette réunion a aussi été l'occasion d'évoquer la création d'une prime à la conversion pour les motos, dans l'optique d'inciter les motards à acheter des véhicules à la fois moins polluants et plus sûrs.
L'abandon du contrôle technique des motos porté en justice
Alors que la situation semblait s'être calmée suite au report, plusieurs associations ont décidé de porter la suspension du contrôle technique des motos devant la justice. C'est notamment le cas de Paris Sans Voiture, Respire et Ras le Scoot qui ont déposé leurs requêtes devant le Conseil d'État et la Commission européenne. Pour appuyer leurs demandes, elles ne manquent d’ailleurs pas d’arguments et d’études prouvant la dangerosité des deux et trois roues :
- les émissions de monoxyde de carbone des véhicules de catégorie L (deux roues, trois roues, etc.) sont près de 10 fois plus importantes que celles des voitures diesel ou essence Euro 6 (1) ;
- la moitié des cyclomoteurs impliqués dans un accident ont été débridés (2) ;
- une moto avec un pot d'échappement non homologué pourrait réveiller 11 000 personnes contre 350 avec un pot homologué sur un parcours identique de nuit à Paris (3) ;
- 579 motocyclistes et cyclomotoristes ont perdu la vie dans un accident de la circulation en 2020, soit plus de 20 % des décès constatés (4).
Pour les associations, l’instauration du contrôle technique aurait permis d’améliorer la situation sous tous les angles : interdiction des modèles trafiqués, suppression des motos les plus anciennes et les plus polluantes ou encore interdiction des deux roues trop bruyants. L’affaire étant néanmoins loin d’être terminée, les mois qui viennent nous en apprendront certainement davantage sur l’avenir du contrôle technique obligatoire pour les motos et les quadricycles à moteur.
Sources :
- (1) Émissions polluantes provenant de cyclomoteurs, motocycles et autres véhicules de catégorie L à Paris - ICCT - 2019
- (2) Ni débridage, ni kitage du cyclomoteur - Association Prévention Routière – 2016
- (3) Vidéo sur le bruit des deux-roues motorisés : L'impact des dispositifs d'échappement non homologués – 2017
- (4) Bilan 2020 de la sécurité routière - ONISR – 2021