La crise sanitaire et économique que nous connaissons actuellement a profondément marqué le marché automobile tricolore. Mais, plus important encore, elle a rebattu les cartes et permis aux véhicules propres de prendre une place grandissante, et ce, au détriment des modèles thermiques. L’occasion de faire un état des lieux du marché des voitures électriques et hybrides et d’envisager son avenir à court et moyen terme.
Une année record pour les véhicules électriques et hybrides
En raison de la crise sanitaire, touchant directement le marché automobile français, 2020 a été l’année de toutes les surprises. Pour preuve, le nombre de ventes sur 12 mois a reculé de 25,5 % par rapport à 2019, tous véhicules confondus. Les voitures particulières n'ont d'ailleurs pas été épargnées puisque le nombre d'immatriculations a chuté de 26,1 % comme l'indique le CCFA (Comité des constructeurs français d’automobiles) (1). Dans ce contexte, ce sont tout particulièrement les modèles diesel et essence qui ont fait les frais de ce recul inédit. Le nombre d'immatriculations de voitures particulières thermiques a en effet reculé de 38 %, soit 1,28 million de ventes en 2020, contre 2,04 millions en 2019 (2).
Si le marché thermique connaît une crise sans précédent, les véhicules propres, offrant des exonérations de carte grise, suivent pour leur part la trajectoire inverse. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les immatriculations de voitures particulières électriques ont bondi de 160 % pour atteindre 110 900 en 2020, contre seulement 42 700 l'année précédente. Même progression pour les véhicules hybrides et hybrides rechargeables puisque le nombre d'immatriculations est passé de 125 400 en 2019 à 243 700 en 2020, soit une hausse de près de 95 % sur un an. En tenant compte de toutes les autres motorisations considérées comme moins polluantes (superéthanol, GPL, GNV et biocarburation), près de 371 600 véhicules propres ont été vendus en 2020, soit une augmentation de 110 % (2).
Véhicules propres et thermiques : un nouveau rapport de force
Cette chute des véhicules diesel et essence a une conséquence directe : la proportion de véhicules thermiques vendus n'a jamais été aussi faible. Une fois encore, les chiffres fournis par le CCFA en sont la meilleure illustration. En 2019, les voitures particulières essence ont représenté 57,9 % des immatriculations, tandis que les diesel se sont accaparés 34,1 % du marché, soit un total de 92 % des ventes nationales. L'année dernière en revanche, les essence ont représenté à peine la moitié des immatriculations (46,9 %), alors que les diesel se sont difficilement maintenus à un niveau équivalent (30,6 %). Au final, les voitures particulières thermiques se sont adjugées « uniquement » 77,5 % des ventes, une situation inimaginable il y a encore seulement quelques mois (2).
Et dans ce marasme général, ce sont – sans grande surprise – les véhicules propres qui tirent leur épingle du jeu. Pour preuve, la part de voitures particulières électriques est passée de 1,9 % en 2019 à 6,7 % en 2020, tandis que les hybrides (incluant les hybrides rechargeables) sont passées de 5,7 % de part de marché à 14,8 %. En additionnant toutes les motorisations alternatives (électrique, hybride, superéthanol, etc.), les véhicules propres ont représenté 22,5 % des immatriculations totales en 2020 sur le segment des voitures particulières, contre 8 % en 2019 (2).
Un essor des véhicules propres qui se confirme en 2021
Certes, le marché automobile tricolore a repris des couleurs en ce début d’année. Sur les 3 premiers mois de 2021, il s'est ainsi vendu 441 600 voitures particulières, soit une légère hausse de 21 % par rapport à la même période en 2020. Malgré tout, les véhicules thermiques poursuivent leur inexorable chute puisque, sur ce trimestre, les essence et diesel ont représenté « seulement » 67,9 % des immatriculations en France (3).
En toute logique, les véhicules propres continuent de rattraper leur retard. Grâce notamment à 101 700 voitures particulières hybrides et 30 439 électriques vendues, les véhicules propres ont accumulé près d’un tiers des immatriculations sur le premier trimestre 2021 (3). Une belle performance, due en partie à un mois de mars exceptionnel au cours duquel il s’est vendu 30 700 véhicules électriques et hybrides rechargeables (4).
Un marché dynamisé par plusieurs bestsellers
Si le marché des véhicules propres connaît une progression fulgurante depuis le début de la crise sanitaire et économique, il le doit essentiellement à plusieurs bestsellers qui ont dynamisé les ventes. Sur les 110 900 voitures particulières électriques commercialisées l’année dernière, la Renault Zoé a représenté 33 % du marché à elle seule avec 37 400 immatriculations. Derrière, la concurrence est dépassée et ne semble pas en mesure de contester l'hégémonie de la marque au losange. Hormis la Peugeot e-208, vendue à 16 600 exemplaires l'année dernière, les autres modèles sont à la peine, à l'image de la Tesla Model 3 (6 500 immatriculations), de la Hyundai Kona (5 200) et du Kia e-Niro (5 100). Un manque de diversité qui, à terme, pourrait porter préjudice à l’ensemble du marché de l’électrique (5).
De son côté, le marché de l’hybride et de l’hybride rechargeable fait meilleure figure, offrant davantage de diversité. Tandis que ce sont les Peugeot 3008, Renault Captur et DS7 Crossback qui dominent le classement des hybrides rechargeables, le segment des hybrides simples est principalement animé par les Toyota C-HR, Corolla et Yaris Hybrid. De bon augure pour l’essor de ces motorisations.
Un écosystème participant à l’hégémonie future des véhicules propres
Alors que ce retournement de situation au profit des véhicules pourrait être considéré comme un épiphénomène, tout laisse à croire qu'il n'en sera rien. En effet, l'écosystème entourant le marché automobile tricolore risque fort d'accélérer l'essor de l'électrique et de l'hybride, leur permettant à terme de remplacer les véhicules thermiques. Plusieurs éléments réglementaires, fiscaux et environnementaux l'expliquent.
- L'obligation de produire plus propre : dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités (LOM), les constructeurs ont l'obligation de diminuer les émissions polluantes moyennes des véhicules qu'ils produisent. En 2040, l'ensemble du parc neuf devra d'ailleurs être uniquement électrique et hydrogène.
- Des limitations de circulation : à moyen terme, les véhicules avec les vignettes Crit'Air les moins performantes seront interdits en ville, comme le prévoit d'ailleurs Paris dès 2021. Notons aussi que les flottes privées et publiques ont l'obligation de passer progressivement à l'électrique.
- Des aides toujours plus nombreuses : même si les montants du bonus écologique et de la prime à la conversion 2021 diminuent cet été, le gouvernement développe de nouvelles aides pour inciter les automobilistes à passer aux véhicules propres, à l'image du bonus écologique pour les voitures électriques d'occasion et du microcrédit véhicules propres.
- Un durcissement du malus : en parallèle, le malus écologique, impactant le coût d’immatriculation, risque de dissuader les automobilistes d’acheter un véhicule thermique. Avec l’abaissement des seuils de déclenchement, l’augmentation du montant maximal (jusqu’à 50 000 € en 2023) et la création d’un malus au poids, l’État entend inciter les Français à migrer rapidement vers les voitures propres.
- Le développement des bornes : si le nombre de bornes de recharge en France n'était encore que de 31 206 en février dernier, le gouvernement a annoncé vouloir atteindre 100 000 points de recharge ouverts au public d'ici la fin de l'année (4). Une annonce qui s’accompagne d’une enveloppe de 100 000 millions d’euros afin d’en assurer le financement et, ainsi, favoriser l’essor des voitures électriques et hybrides rechargeables.
Sources : (1) Marché automobile français – Décembre 2020 / 2019 – CCFA – 2021 (2) Le marché automobile français – Décembre 2020 – CCFA – 2021 (3) Le marché automobile français – Mars 2021 – CCFA – 2021 (4) Immatriculations des véhicules électriques et hybrides rechargeables - Chiffres clés du mois de mars 2021 - Avere France – 2021 (5) Immatriculations des véhicules électriques et hybrides rechargeables - Chiffres clés du mois de décembre 2020 - Avere France – 2021